Mélanie arrive à la maison environ cinq minutes avant que les enfants arrivent de l'école. Parfois, elle a du mal à tenir une conversation avec les enfants parce que son attention se tourne vers les problèmes du bureau et qu'elle passe en revue les événements de la journée. Les enfants se rendent bien compte que Mélanie est inattentive et ils expriment leur frustration en disant souvent : «Maman, tu ne m'écoutes pas !»

Chez les voisins, un scénario semblable se déroule...

Gilles constate qu'il demeure préoccupé par les problèmes du bureau au moins deux heures après son retour à la maison. Lorsqu'il travaille à un projet important et pressant, Gilles se surprend parfois à ressasser tous les détails de son projet au beau milieu d'un repas en famille. Il y a des périodes où sa conjointe le trouve distant alors que les enfants le trouvent grognon pendant les heures qui suivent son retour du bureau.

Sans le savoir, Mélanie et Gilles éprouvent peut-être de la difficulté à faire face à l'un des événements les plus courants et pourtant les plus stressants de la vie quotidienne : faire la transition entre le travail et la maison. Pour bien des gens, les exigences du travail et du foyer sont très différentes. II peut être nécessaire, pour répondre à ces demandes fort divergeantes, de changer radicalement son approche mentale ou d'effectuer un changement de vitesse. Ce phénomène de transition n'est pas nouveau. Il existe depuis que les gens travaillent à l'extérieur. Ce qui est relativement récent, cependant, c'est le fait que cette transition devient de plus en plus difficile par suite de l'intensification et de l'évolution rapide des demandes imposées par le milieu de travail et par la vie familiale.

Au travail, les gens sont bombardés quotidiennement par l'information. Les téléphones cellulaires, les télécopieurs et les ordinateurs améliorent notre accès à l'information. Mais si la nature de notre travail exige que nous réagissions à ces informations à la même vitesse que les dispositifs technologiques peuvent nous les transmettre, il n'est pas étonnant que nous ayons, en fin de journée, un certain rattrapage à faire dans le traitement de toutes ces informations. De plus, si le travail se fait à un rythme accéléré et que nous avons très peu de temps pour réfléchir aux événements de la journée, il peut être difficile pour certaines personnes de se débrancher des situations de stress que procure le travail. Certains remettront en question l'importance de faire une bonne transition entre le travail et la maison. Pourtant, c'est notre aptitude à faire cette transition qui déterminera dans quelle mesure nous réussirons à satisfaire aux attentes que nos proches ont envers nous. Notre façon de gérer cette transition peut avoir une incidence positive ou négative sur les rapports que nous avons avec les membres de notre famille et avec nos amis. Par exemple, si Gilles n'arrive pas à laisser ses problèmes de bureau derrière lui et à se mettre au diapason de sa famille, il s'expose à avoir des problèmes avec sa conjointe ou ses enfants.

Par où commencer ?

Lorsqu'on entreprend d'améliorer sa façon de faire la transition entre le travail et le foyer, il y a lieu de s'interroger sur les idées préconçues les plus courantes au sujet de cette transition. Une des notions les plus répandues consiste à se dire que les difficultés de transition ou les problèmes de changement de vitesse entre le bureau et la maison ne sont que temporaires. Par exemple, Gilles se plaît à se répéter que dès que son projet sera terminé, il pourra se détendre et consacrer plus de temps et d'attention à sa famille. Ce sera peut-être le cas. Mais s'il ne parvient pas une fois son projet terminé à se dégager du stress quotidien, il est fort probable qu'il soit aux prises avec un problème chronique de transition ou de changement de vitesse.

Une autre notion erronée consiste à se dire que la famille et les amis vont comprendre la situation et vont pardonner le manque d'attention qu'on accorde à leurs besoins. C'est certainement le cas pour de courtes périodes. Cependant, si la famille et les amis doivent constamment subir les comportements qui caractérisent les difficultés de transition - impatience, indifférence, inattention, irritabilité - ils finiront par se sentir rejetés et toutes ces relations humaines très importantes seront affectées.

Une fois que nous avons reconnu que nous éprouvons des difficultés à faire la transition entre le travail et la maison, nous pouvons commencer à examiner et à mettre en œuvre des stratégies qui nous permettront de changer de vitesse plus rapidement et plus efficacement. C'est à chacun d'entre nous qu'il incombe de découvrir et d'appliquer les techniques qui nous sont les plus bénéfiques.

La transition commence au travail

Voici quelques techniques dont vous pouvez vous inspirer pour commencer la transition au travail. Une bonne façon de clôturer sa journée de travail consiste à dresser la liste de toutes les tâches à traiter en priorité le lendemain. On peut ainsi quitter le bureau l'âme en paix, sachant que le travail de planification est fait. Vous n'avez pas eu le temps de faire votre liste au bureau ? Faites-la à la maison. L'important, c'est de tout mettre par écrit de façon à ce que vous n'ayez plus à ruminer tous les détails dans votre esprit. Vous êtes donc assuré que vous n'oublierez rien parce que tous les détails sont sur papier. Si c'est possible, essayez de structurer votre journée de manière à pouvoir vous attaquer aux tâches les plus ardues en début de journée. Réservez la fin de votre journée aux tâches qui exigent le moins d'effort. Vous quitterez le travail sur une bonne note, sachant que vous avez accompli toutes les tâches importantes. De plus, en consacrant la fin de votre journée de travail aux activités de routine, vous permettez à votre esprit de décompresser et d'amorcer le processus de transition.

Règle générale, il vaut mieux rester au bureau un peu plus longtemps pour achever un travail urgent que de l'apporter chez soi. Le fait d'apporter régulièrement du travail à faire à la maison risque de créer une situation ambiguë pour vous et votre famille quant à la ligne de démarcation qui doit exister entre le lieu de travail et le foyer. La transition devient ainsi d'autant plus difficile à effectuer en douceur. Si vous devez apporter du travail à la maison, indiquez clairement votre espace de travail. Informez tous les membres de votre famille de l'endroit que vous vous réservez pour travailler, de la période que vous désirez consacrer à votre travail et des consignes relatives aux interruptions. II est important de prévoir des périodes d'interaction avec les membres de la famille.

Le retour à la maison

Une des techniques de transition les plus efficaces consiste à utiliser la période de retour à la maison pour opérer son changement de vitesse. Pour se distraire, les automobilistes peuvent écouter de la musique à la radio et ceux qui voyagent en autobus peuvent lire un livre. Si vous préférez, vous pouvez vous changer les idées et réorienter vos préoccupations vers la famille en planifiant vos loisirs de la soirée ou vos sorties de la fin de semaine. Parce qu'elle n'a pas vraiment le temps de se préparer à l'arrivée des enfants, Mélanie devrait, autant que possible, profiter de la période de retour à la maison pour faire sa transition.

L'heure du débarquement

Lorsque vous arrivez à la maison, il y a certaines choses que vous pouvez faire pour rendre la transition plus facile. Vous pouvez poser certains gestes concrets qui soulignent le changement, par exemple changer de tenue et revêtir des vêtements plus confortables. Pour s'accorder quelques minutes de répit afin de se changer les idées, on peut prendre un bain ou une douche. Si vous avez besoin de plus de temps pour vous réorienter mentalement et émotionnellement, parlez en avec votre famille et vos amis. Il se peut, par exemple, que vous ayez besoin d'une demi-heure de solitude pour vous débarrasser du stress de la journée. Si vous abordez franchement la question avec les membres de votre famille, ils n'interpréteront plus votre comportement comme un signe d'indifférence de votre part. II peut arriver, une fois à la maison, que vous vous inquiétiez d'une situation inusitée survenue au cours de la journée, une erreur ou un accident par exemple. Vous auriez avantage à remettre cette expérience en perspective et à l'envisager objectivement. Demandez-vous ce que vous pouvez y faire présentement et ce que la situation vous a permis d'apprendre. Évitez, autant que possible, le piège des «si seulement». Ce qui est passé est passé. Prenez du recul par rapport à la situation et demandez-vous quelle importance aura cet événement dans une semaine ou un mois. Dans la plupart des cas, en replaçant les événements dans une optique plus globale, on est mieux en mesure de cesser de s'inquiéter.

Une technique qui peut nous aider à nous libérer du stress consiste à se plonger dans des activités récréatives agréables et revigorantes. L'activité physique sous toutes ses formes aide de nombreuses personnes à opérer leur changement de vitesse. D'autres activités telles le bénévolat ou le fait de s'adonner à un passe-temps nous permettent de nous renouveler et de refaire le plein d'énergie. Nous avons souvent avantage à choisir une activité passablement différente de celle que nous exerçons au travail. La participation en famille ou entre amis ajoute souvent une nouvelle dimension aux loisirs.

Petit à petit...

Apprendre à changer de vitesse entre la vie professionnelle et la vie familiale ne se fait pas du jour an lendemain. II faut un certain temps pour changer ses habitudes et adopter des techniques qui correspondent vraiment à sa personnalité. Chaque petit effort compte. Le fait de pouvoir changer de vitesse à volonté vous procurera de grandes satisfactions. Vous vous sentirez plus détendu parce que vous aurez un meilleur contrôle de la situation. Vous pourrez accorder une plus grande attention aux personnes et aux activités. Par le fait même, vous jouirez davantage de vos expériences quotidiennes.

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